Des employés de l'entreprise pékinoise Mobike Technology Co en selle sur le Mobike Lite, le dernier-né de ses services de vélo en libre-service, dans le district de Haidian à Pékin. [Zou Hong/China Daily] |
Des programmes privés de location de vélos en libre-service font naître l'espoir de relancer l'amour du public pour le déplacement sur deux roues.
Au cours des années précédant la politique d'ouverture et de réforme qui a fait de la Chine la deuxième économie mondiale, les images de millions de personnes parcourant les routes à vélo ont conduit de nombreux étrangers à désigner le pays comme le « royaume de la bicyclette ». Avec la croissance économique qui a élevé le niveau de vie, la Chine est maintenant le deuxième marché automobile mondial, mais l'envers du décor, ce sont des routes saturées et un problème de pollution de l'air persistant.
Aujourd'hui, de nouveaux services de partage de vélos font naître l'espoir de ranimer l'histoire d'amour du pays avec la bicyclette et de permettre aux gens de vivre une vie plus saine.
Un tournant
Le système public de vélos en libre-service n'est pas nouveau en Chine. Alors que le nombre de véhicules sur les routes du pays a commencé à s'envoler au milieu des années 2000, les municipalités se sont mises à investir dans des projets abordables de partage de vélos. Pékin a lancé son programme en 2011 et compte désormais 800 stations de location offrant environ 50 000 bicyclettes. Wuhan, dans la province du Hubei, et Hangzhou, dans celle du Zhejiang, détiennent l'une et l'autre un record mondial du nombre de bicyclettes en service public avec 90 000 vélos pour la première et 60 000 pour la seconde.
Toutefois, les usagers se plaignent fréquemment de la lenteur de traitement des demandes et de la difficulté à localiser les pôles de location de vélos.
« Quand les bicyclettes publiques subventionnées par l'État ont fait leur apparition dans les rues de Pékin, je les ai utilisées », dit Wu Xiaohui, une danseuse pékinoise âgé de 23 ans. « Mais j'ai perdu ma carte de transport qui contenait mon dépôt de garantie et les données de mon abonnement, et il s'est avéré si difficile d'en obtenir une nouvelle que j'ai cessé de me servir des vélos ».
Ces paroles ont trouvé un écho auprès de Zhang Hui, rédactrice en chef d'un magazine à Shanghai, qui a récemment commencé à utiliser des Mobikes fournies par un système privé de vélos en libre-service. « Au début, je ne m'intéressais pas aux vélos Mobike, mais je voyais un nombre croissant de gens s'en servir et j'ai été attiré par la ligne élégante des bicyclettes. Ma curiosité était piquée et j'ai décidé de les essayer ».
L'inscription était simple. « Il n'y a pas de carte de transport ou de procédure bureaucratique. Du moment qu'on a un smartphone et un dépôt de garantie de 299 yuan (40 euros), on peut rouler », précise la jeune femme de 29 ans, qui a recommandé le service aux membres de sa famille et à ses amis parce qu'il offre un mode de transport bon marché et pratique – une course de 30 minutes coûte environ 1 yuan.
Une technologie innovante
Le système des Mobikes, exploité par une jeune entreprise appelée Beijing Mobike Technology Co, a fait son apparition à Shanghai en avril et à Pékin en septembre, incitant les gens à pédaler plutôt que conduire sur de petits parcours. Mobike se développe rapidement dans les grandes villes et figure parmi les cinq applications les plus demandées en matière de transport gratuit et de tourisme sur la boutique d'applis en ligne iPhone Chinese.
« Nous voulons faire revenir les vélos dans les villes chinoises », affirme Hu Weiwei, fondatrice de Mobike. « Nous employons une technologie innovante pour fournir de meilleurs services ».
Le modèle flottant offert par l'entreprise libère les usagers du besoin de rechercher des points d'attache précis pour la restitution et la prise des bicyclettes, tandis qu'un GPS installé dans un cadenas « intelligent » leur permet de localiser et de louer leur vélo à l'avance. Dans la dernière génération des bicyclettes argent et rouge, Mobike Lite, qui est devenue fonctionnelle à Pékin et Shanghai le 19 octobre, le cadenas intelligent est alimenté par l'énergie solaire.
Mobike a par ailleurs lancé un système de points destiné à punir les usagers qui enfreignent aux règles. Des points sont retirés à un utilisateur qui laisse régulièrement les vélos au mauvais endroit et les comptes des récidivistes sont fermés.
Un mode de déplacement plus vert
Avec l'expansion économique, les niveaux de pollution augmentent et la rivalité entre les différents types de transport pour se faire une place sur les routes devient féroce, si bien que des modes de déplacement plus efficaces et plus verts sont nécessaires.
Dans une étude sur le vélo en libre-service publiée en avril de l'année dernier, Roland Berger, une société internationale de conseil en entreprise, est parvenue à la conclusion suivante : « le vélo en libre-service est appelé à se développer très rapidement, offrant à ses utilisateurs un nouveau moyen de se déplacer en zone urbaine ».
Selon l'étude, en décembre 2013, environ 640 programmes de vélos en libre-service, représentant plus de 640 000 bicyclettes, étaient déjà en service à l'échelle mondiale, et le marché devrait progresser de 20% par an. En 2020, le marché mondial pourrait atteindre en valeur 5,8 milliards de dollars (5,2 milliards d'euros).
« Le modèle Mobike n'est pas le fruit d'une planification gouvernementale rationnelle, mais le produit de l'innovation dans le secteur privé », estime Gao Fan, chargé de cours d'économie à l'Université Fudan de Shanghai.
Le profit est la clé qui permet à des entreprises privées de fournir des produits adaptés aux besoins du public. Si l'innovation génère des profits, le secteur privé fournira les biens et les services que le public demande, selon M. Gao.
Pour Zhu Dajian, professeur à l'école d'économie et de gestion à l'Université Tongji, « le modèle Mobike améliore les modèles technologiques et commerciaux simultanément, contribuant ainsi au développement de l'économie chinoise à la demande. Il peut même provoquer un nouvel élan du cyclisme en Chine ».
Article réalisé avec la participation de Wang Zehua.