Vestiges d'architecture de style occidental au Yuanmingyuan. [Wang Kaihao/China Daily] |
Le Yuanmingyuan, un lieu de villégiature fréquenté par la royauté Manchu, avait été incendié par les forces expéditionnaires anglo-françaises en 1860. Les archéologues examinent aujourd’hui les vestiges de ce magnifique site historique.
En Chine, la destruction du Yuanmingyuan (« le jardin de la clarté parfaite »), aussi connu comme l'Ancien Palais d'été à Pékin, est considérée comme une tragédie nationale. En 1860, au cours de la Seconde Guerre de l'opium (1856-60), les forces expéditionnaires anglo-françaises avaient réduit en cendres ce lieu de villégiature de toute beauté destiné à la royauté Manchu, sous la dynastie Qing (1644-1911).
Mais aujourd'hui, une action a été entreprise pour redécouvrir ce qui était un magnifique jardin. À l'aide de tableaux d'art et de dossiers historiques, les archéologues s'efforcent reconstituer une image plus complète du site classé.
Les travaux à l'est des ruines du Yuanmingyuan ont mis au jour un jardin adorable de style Jiangnan (du nom de régions de Chine orientale situées sur la rive sud du fleuve Yangtsé). Sur une surface de 19 000 mètres carrés, c'est une copie du Zhanyuan, un jardin de Nanjing dans la province orientale du Jiangsu, réalisée selon un décret de l'Empereur Qianlong (1711-99). Achevée en 1767, cette reproduction a été baptisée Ruyuan, qui veut dire « un jardin tout comme le Zhanyuan ».
Les bases énormes et presque intactes de bâtiments ont été découvertes sur le site parallèlement à un jardin dont les allées sont pavées de dalles de couleurs vives. « Ce fut une surprise de trouver les fondations si bien conservées », dit Zhang Zhonghua, un archéologue de l'Institut de recherche sur le patrimoine culturel de Pékin et chef du projet de Yuanmingyuan.
« Seules quelques sections éparses et abimées étaient visibles avant les fouilles ». Il cite par exemple une fondation de la résidence Yanqing d'un mètre de haut, à côté d'une partie enfouie dans le sol sur 1,4 mètre. « La profondeur de la fondation indique que la résidence était immense », dit M. Zhang. Avec 322 mètres carrés de surface, c'était le principal bâtiment du Ruyuan.
La découverte de céramiques concaves indique par ailleurs que le Ruyuan était équipé d'un système de chauffage central. Les fouilles ont également révélé la présence d'un lac artificiel et d'un dispositif spécial pour régler l'arrivée de l'eau. Les empereurs pouvaient ainsi prendre un bateau en entrant dans le jardin pour aller jusqu'à un appontement près de la résidence.
L'équipe dirigée par M. Zhang analyse aussi les graines découvertes dans la zone afin de déterminer le type de fleurs qui poussaient au Ruyuan.
L'archéologue explique que par rapport à la Cité interdite, qui mettait l'accent sur les rituels protocolaires, le Ruyuan était un endroit où les empereurs pouvaient se détendre. « Le schéma des sentiers de randonnée au Ruyuan est irrégulier, ce qui révèle le style décontracté des souverains. On a même trouvé un prototype de réseau routier urbain moderne, un peu comme les routes de délestage et les ronds-points actuels, signe d'une planification avancée ».
Par ailleurs, si les maisons sont orientées au sud dans l'architecture chinoise traditionnelle, les bâtiments du Ruyuan contreviennent à la règle, probablement parce qu'ils étaient conçus pour offrir aux empereurs une vue du lac depuis tous les coins du jardin.
La calligraphie de l'Empereur Jiaqing sur deux dalles témoigne de la rénovation effectuée sous le règne de Jiaqing (1796-1820). M. Zhang signale la présence de marques rougeâtres sur les dalles découvertes sur le site, ce qui indique des traces de flammes. « Toutes les dalles retrouvées étaient fissurées. Utilisées dans les institutions impériales, elles étaient de première qualité. Les fissures prouvent qu'elles avaient brûlé pendant un bon moment ».
Son équipe tente de déterminer la date de l'incendie. « Pour l'instant, je peux vous dire que le feu a eu lieu sous l'ancienne dynastie Qing. Il est donc prématuré de le relier aux pillages de 1860 ».
Toutefois, M. Zhang constate qu'il n'existe aucun document historique concernant le Ruyuan après terme du règne de l'Empereur Xianfeng (1851-61), ce qui signifie probablement que le jardin a été détruit à la période qui coïncide avec l'invasion anglo-française.
Un examen préliminaire du site a eu lieu en 2012, mais le chantier principal a commencé l'an dernier sur 3 800 mètres carrés. M. Zhang indique que la disposition du Ruyuan montre qu'il comportait une passerelle le reliant à des jardins voisins, et selon lui, il est possible qu'il existe des ruines sous le campus de l'université Tsinghua, qui est de l'autre côté de l'avenue Zhongguancun Nord. « Le Yuanmingyuan était bien plus vaste que les ruines qu'on voit aujourd'hui ».
Vestiges d'architecture de style occidental au Yuanmingyuan. [Wang Kaihao/China Daily] |